Ascension Everest

La préparation, le mental

On dit que dans un marathon, c’est le corps qui porte la tête les 35 premiers kilomètres et la tête qui porte le corps le restant.

Dans toutes les épreuves qui combinent l’endurance et le physique, le mental est donc un point essentiel.

Pour l’Everest, le mental est mis à rude épreuve car cette montagne porte en elle tous les ingrédients générateurs de stress : l’inconnu complet, le danger mortel, les choix à faire, les enjeux, l’unicité, la durée, les « on dit », les histoires, les films, etc… Et le sans oxygène qui est un amplificateur de stress. L’Everest apparaît comme la bataille de toutes les batailles, une énormité monstrueuse indomptable.

Or le stress est l’ennemi de la réussite. Je me souviens d’une phrase de Philippe LECLERC, champion du monde du 3000m, « quand on a une pensée négative dans l’effort, c’est comme si on appuyait les deux mains sur le frein. »

Donc, se préparer mentalement c’est de faire en sorte de ne pas avoir de pensées négatives. Et pour cela, il ne faut rien avoir à se reprocher et éviter les surprises, l’inconnu qui vous submergent dans la difficulté.

C’est pour cette raison que j’ai inclus dans ma préparation l’ascension du Chimborazo, pour me rappeler ce qu’est la haute altitude. Et bien m’en a pris ! J’avais oublié les effets de la haute altitude sur le corps. Du coup, j’ai été déstabilisé quand lors de l’ascension je constatais que je n’avais plus de force pour monter. J’ai dû puiser dans mes réserves pour surmonter cette impression négative de moi, mais j’ai failli faire demi-tour. Cet entrainement m’a donc rappelé que le corps est affaibli et que ce n’est pas parce qu’on n’a plus d’énergie, de force pour monter qu’on est nul, qu’on n’y arrivera pas, mais qu’il faut faire avec en montant plus lentement. Il faut donc ancrer cette idée dans la tête pour ne pas être déstabilisé le jour J.

L’autre façon d’entrainer mon mental a été de réussir à maintenir l’ensemble des exercices de préparation physique, PPG , course à pied, vélos, etc, alors que j’ai un emploi du temps très chargé. Maintenir le cap du programme d’entrainement, alors qu’on est fatigué, blessé, qu’on n’a pas le temps mais qu’il faut quoiqu’il en soit faire des efforts de façon constante le matin, le midi le soir voire la nuit, ça renforce la volonté et l’estime de soi. Et ainsi, le jour venu, on n’aura rien à se reprocher, donc pas d’énergie négative potentielle. Et le fait de réussir à maintenir l’atteinte des objectifs génère de la confiance en soi, et plus le challenge réussit est difficile plus on est à même ensuite de réussir des choses au départ impensables. Maintenir l’intensité des efforts et sur une longue durée m’a permis de me construire l’idée forte que je suis devenu une machine. Se dire qu’on est une machine est une programmation mentale qui puissante, car une machine ne se laisser pas déstabiliser le moment venu. Une façon de gérer ses émotions en les court-circuitant.

L’effort extrême a une amie qui lui est irrémédiablement liée : la souffrance. Il faut donc apprendre à la gérer. Et le premier pas est d’accepter sa présence, l’intégrer et ne pas la fuir. La fuir est sans issue c’est donc l’échec assuré et par là même, et donc la déstabilisation du mental et la spirale de l’énergie négative et de l’échec. A l’opposé, en connaissant au préalable sa présence, sa nature, la nommer, c’est la dompter. Mais pour l’ascension de l’Everest, il y a une souffrance que je ne connais pas : le manque d’oxygène. Surtout moi qui suis claustrophobe ! Je me suis un peu entrainé à faire des apnées pour intégrer ce manque. Mais surtout, j’ai eu la chance dans mes entrainements de faire du vélo home traineur sous hypoxie : pédaler pendant 50 mn avec un masque sur le visage obligeait à faire des efforts respiratoires douloureux pour pouvoir respirer un air appauvri en oxygène. Ça a été terrible. Il m’a fallu une volonté très forte pour continuer à faire ces exercices. Au départ cette activité avait pour objectif d’améliorer ma capacité physique en altitude en obligeant mes cellules à fonctionner en hypoxie. Mais avec le recul, je pense que le bénéfice majeur a été de me projeter dans la souffrance respiratoire de la très haute altitude sans assistance en oxygène. Et je sais maintenant ce qui m’attend. Autrement dit, je ressors plus fort de ces épreuves.

Je vais m’arrêter là sur la préparation mentale car cela pourrait faire l’objet d’un livre entier.

Je reviendrai plus tard sur la partie spécifique sur l’ascension sans oxygène.

Je finirai ici sur un aspect important invisible que porte l’EVEREST en lui. Cette montagne par ce qu’elle représente, ses dangers, etc, met une pression énorme sur celui qui veut la conquérir. Et cette pression est contreproductive. J’ai donc usé d’un stratagème pour diminuer cette pression en manipulant mon propre esprit : j’ai considéré que cette énormité n’était au final qu’un « gros cailloux ». Dès lors, je ne parle plus de l’Everest comme le toit du monde, mais comme d’un simple gros caillou. Un gros caillou où il faut simplement faire un pas après un pas pour arriver à son point le plus haut. Et il faut que je garde en tête cette vision de cette montagne. Sans toutefois négliger la réalité qui m’attend, car l’effet de surprise serait terrible. Je suis donc sur une ligne de crête comme on dit, où je dois diminuer ce qu’est l’ascension de l’Everest sans sous-estimer la réalité. Un exercice d’équilibriste dont la tension de la corde fluctuera au fur et à mesure.

Une réflexion au sujet de « La préparation, le mental »

  1. Je te souhaite de dompter ce gros caillou, pas à pas… Vas y mon petit Pascal. De grosses pensées pour toi.

Répondre à Hélène Chauvineau

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